lundi 12 septembre 2016

La danse odorante des abeilles

On répertorie des milliers d’espèces d’abeilles différentes. Alors que certaines vivent en solitaire, d’autres, les abeilles sociales, œuvrent en groupe, une colonie laborieuse et démocratique.

Au sein de cette société matriarcale, où trônent une reine et des femelles affairées, chaque abeille a un rôle à jouer. Afin de s’organiser et d’exécuter leurs tâches respectives, les abeilles, pour communiquer entre elles, dansent.

Cette complexe et ô combien captivante communication non-verbale, mise en lumière par l’éthologue d’origine autrichienne Karl von Frisch (1886-1982) (1) démontre toute l’ingéniosité des abeilles et de la Nature.

Que se soit pour partager des informations concernant une source de nourriture (nectar et pollen) ou encore une nouvelle localisation pour la colonie, un mouvement collectif d’émigration appelé essaimage, on distingue deux types de danse, la ronde et la danse frétillante (2), déterminée selon la distance du butin.

Fascinantes, ces danses, dont les composantes contiennent des informations précises quant à la distance, la direction (l’angle par rapport au soleil) et la concentration de sucre ou la qualité du nouvel emplacement - tout cela en tenant compte des détours et du facteur éolien qui ralentissent la progression des abeilles vers leur destination! -, ne sont pas vues par les autres abeilles, mais bien senties et ressenties.

En effet, la ruche étant plongé dans l’obscurité et leur sens de l’odorat hautement aiguisé, c’est grâce à leurs antennes, organes olfactifs des abeilles, que les congénères perçoivent le parfum capturé à la source par la danseuse et conservé dans son jabot. À partir de l’intensité de ses frétillements, de ses vibrations, des sons émis et de l’odeur répandue durant sa prestation, les réceptrices du message, butineuses et éclaireuses, sont alors en mesure de repérer le lieu d’intérêt.

Fait intéressant, dans le cas d’un essaimage, essentiellement le « déménagement » de la colonie avec la reine, chaque éclaireuse ira visiter les sites potentiels avant d’en arriver à un consensus. 

Disons que les êtres humains, dont la survie dépend notamment d’elles (3), ont encore beaucoup à apprendre de la coopération des abeilles.

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(1) Prix Nobel de physiologie ou médecine en 1973, partagé avec Konrad Lorenz et Nikolaas Tinbergen, et auteur de Vie et mœurs des abeilles (1927; Éditions Albin Michel, 2011). 

(2) Visionnez la danse frétillante d'une abeille.

(3) La pollinisation et la fertilisation des fruits et des légumes reposent en grande partie sur les abeilles dont la survie est pourtant menacée depuis quelques décennies en raison des pesticides systémiques utilisés dans la monoculture. La disparition accrue des colonies d’abeilles affecte tous les continents et met en péril l’agriculture, et donc la survie de l’espèce humaine dont 33% de la nourriture serait attribué au travail des abeilles. Pour en savoir davantage sur le sujet, ne manquez pas de visionner des documentaires comme Vanishing of the Bees (2011), Queen of the Sun (2011), ou encore de vous renseigner sur le syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles (en anglais CCD – Colony Collapse Disorder).